La Ligue Braille vous (re)connecte
Demander un certificat à sa commune, réserver un voyage ou faire livrer ses courses en restant chez soi, c’est possible grâce aux smartphones, tablettes ou ordinateurs. À condition de savoir les utiliser ! C’est l’une des missions de la Ligue Braille.
Si les jeunes semblent être nés un téléphone à la main, tout n’est pas si logique et intuitif pour tout le monde, certainement pas pour les personnes aveugles et malvoyantes. La Ligue Braille propose des cours pour apprendre à utiliser ces objets connectés. Un service qui connaît un grand succès, particulièrement depuis la pandémie ! Myriam Chabot fait partie du Service d’information sur les adaptations techniques qui dispense les précieuses leçons.
« Nos apprentis sont envoyés par le Service social, qu’ils aient déjà un smartphone ou pas. Nous avons des modèles qui fonctionnent avec Android ou iOS (Apple), ce qui permet à la personne de les tester et choisir le plus adapté ».
Bilan de compétences
Tout commence toujours par un bilan : quelles sont les compétences technologiques de la personne et quels sont ses besoins. Les plus de 65 ans sont les plus demandeurs. « Certains veulent juste passer des appels et envoyer des SMS, l’achat d’un smartphone ne se justifie pas, la personne est alors orientée vers les GSM à grosses touches que l’on trouve au BrailleShop ». Pour ceux qui ont besoin d’un smartphone, le cours dure une heure trente. « En général, on table sur 4 ou 5 rendez-vous, puis on refait un bilan. Parfois certains vont plus loin que ce qui avait été discuté ».
Première étape, gérer l’accessibilité, dans les réglages. « Les constructeurs ont fait de gros efforts, ces dernières années, pour le public mal ou non voyant. On peut adapter la taille des lettres, les contrastes, la lumière. On peut activer le zoom ou VoiceOver/ TalkBack (deux applications qui lisent à voix haute les informations à l’écran). L’accessibilité passe aussi par des commandes manuelles. Sur certains modèles, taper 2 ou 3 fois sur l’écran par exemple, ou sur l’arrière du téléphone, correspond à des commandes particulières.
Ce qui nous importe, c’est que chacun gagne en autonomie, en fonction de ses besoins et de ses compétences. Certains, c’est vrai, ont plus de mal et ont besoin de plus de temps et d’exercices pratiques. Tous reçoivent un syllabus en grands caractères qui rappelle les étapes à suivre. Pour les personnes aveugles, nous enregistrons ce mode d’emploi en vocal, grâce au dictaphone du téléphone ».
L’assistant vocal
L’outil est disponible sur votre smartphone ou une enceinte connectée, à la maison. Il s’appelle Siri, Alexa, Google ou Bixby et répond à de nombreuses demandes comme « Quelle sera la météo demain ? » ou « Lance un minuteur de 3 minutes ». À condition de poser la question correctement ! « Il y a des personnes âgées pour qui il est impossible de parler à une enceinte. Il peut aussi y avoir un problème de diction ou de langue, mais la plupart du temps, c’est un service très utile ». Pratique également lorsqu’il est compliqué de manipuler le smartphone, en cas de tremblements, par exemple. L’assistant vocal peut accéder aux applications. Exemple : « Siri, ouvre l’application Belfius. Consulte mon solde. Paie telle facture ».
Les applications
Des applications ont été créées spécifiquement pour le public aveugle et malvoyant. Citons Seeing AI (Apple) qui scanne des documents et les lit à voix haute. Pratique pour lire un menu, une lettre ou un emballage. Grâce à l’Intelligence Artificielle, cette application peut également scanner un visage et décrire l’humeur de la personne. L’équivalent sur Android s’appelle LookOut. Pour ceux qui se déplacent, l’app SNCB Assist a été récemment mise à jour et répond mieux aux attentes. Citons Moovit pour les déplacements en transports en commun.
De nombreuses applications sont tout à fait accessibles aux personnes aveugles et malvoyantes. Selon notre enquête sur la mobilité, 75 % des sondés utilisent Google Maps pour leurs trajets. « L’application Uber est aussi très accessible et sa version EATS est très utilisée par les personnes mal ou non voyantes pour consulter le menu, lorsqu’ils sont au restaurant. Globalement, la plupart des applications traditionnelles sont compatibles avec TalkBack (Android) et plus encore avec VoiceOver (iPhone), notamment l’application ItsMe qui sert à s’identifier en ligne, se connecter aux portails des administrations, confirmer des transactions ou signer des documents ».
En revanche, des applications restent très mal conçues et pas du tout adaptées. « YouTube est un labyrinthe pour les personnes malvoyantes. Il faut tout balayer, ça prend un temps effroyable. La plupart des applications bancaires ont également pas mal de travail à faire pour être réellement accessibles. Parfois, les agrandissements font sortir des éléments de l’écran, ce qui fait rater des informations ».
L’échéance 2025
En principe, ces applications mal conçues ne devraient plus l’être très longtemps. L’Acte Législatif Européen sur l’Accessibilité entre en vigueur ce 28 juin 2025. Passé cette date, tous les produits et services devront être accessibles aux 87 millions d’Européens qui sont en situation de handicap. Les ordinateurs, smartphones, tablettes et leurs systèmes d’exploitation, les terminaux (distributeurs automatiques de billets, de titres de transport et les bornes d’enregistrement), les services de téléphonie, les livres numériques et le commerce en ligne devront être utilisables par tous, notamment les personnes en situation de handicap visuel. En Belgique, une dérogation a été accordée aux microentreprises qui ont jusqu’à 2030 pour se conformer aux nouvelles exigences européennes.